Kim Eun-hee, Kim Seong-hun, Park In-je – Kingdom (Saison 2)
Le cinéma coréen est quelque chose qui m’est largement inconnu. Bien que le cinéma coréen soit vraisemblablement plein de choses qui pourraient énormément me plaire, je n’ai jamais eu l’occasion de m’y intéresser. Je m’y suis même largement désintéressé, après avoir été gonflé, entre autres, par la critique sociale à la truelle du récent succès mondial Parasite. Et les zombies aussi, ça m’indiffère. Même si je suis resté fan jusqu’au bout de la série de comics The Walking Dead, j’ai toujours du mal à comprendre la fascination que ça suscite, je trouve que ces histoires tournent souvent en rond, surtout pour des trucs longs comme des séries (typiquement, The Walking Dead en série, dès la saison 2, c’était devenu insupportable).
Je me demande bien ce qui a pu me pousser à regarder Kingdom, première production de Netflix au pays du matin calme, signée Kim Eun-hee et Kim Seong-hun (et Park In-je pour la réalisation de la plupart des épisodes de la deuxième saison). Peut-être l’aspect historique de la série m’avait-il intrigué, ou la perspective de voir des cadavres découpés au sabre par des mecs qui surjouent. Bref, il y a un an, je me lançais dans la saison 1 de Kingdom. C’était parfois surjoué, parfois un peu le bordel, parfois les personnages nous étaient assez antipathiques, mais c’était tout de même rudement chouette. Et puis là, surprise : la saison 2 de Kingdom est, en série, probablement le truc le plus dingue que j’ai regardé depuis des mois.
Résumons : après un twist génialement imprévisible (les morts ne reviennent plus à la vie que la nuit, mais aussi, désormais, le jour!), les héros de Kingdom, toujours menés par un prince déchu, se retrouvent à découper du mort et à démêler des intrigues politiques. Enfermés dans une province peuplée de goules, ils devront tenter de trouver un moyen de renverser la reine, considérée comme légitime car apparemment enceinte du roi de Joseon, qui était lui-même le “patient zéro” de la maladie. C’est un poil alambiqué, mais c’est génial.
C’est sans doute ça, ce qu’il y a de plus plaisant dans Kingdom : les zombies sont toujours là et fondent toute la tension dramatique de la série, tout, en somme, vient d’eux. Et pourtant, c’est avant tout la politique du Royaume de Joseon qui est au centre de l’intrigue : sur les six épisodes (c’est peu, mais c’est juste assez), au moins deux ne font apparaître les zombies que de manière très superficielle, les cantonnant à un rôle de Deus Ex Machina final. Empoisonnements, révolutions de palais, mensonges, tout est là, et on se retrouve finalement davantage dans un thriller politique que dans la série d’horreur qu’on nous avait vendue.
Mais surtout, une série d’horreur historique! Et là-dessus, la série est encore une fois une réussite incontestable : les costumes, les décors, les codes et expressions orales, même le jeu très expressif des acteurs, tout dans la série est une réussite incontestable pour ce qui est de la reconstitution d’un Joseon fictif. En plus des robes amples, des sabres, des palais magnifiques, ce sont aussi et surtout les chapeaux invraisemblables (mais parait-il tout à fait fidèles à la réalité historique) qui marquent. En somme, Kingdom est une série absolument délicieuse à voir, à regarder. Surtout que la série est une grande réussite esthétique, Netflix (ils le font souvent, je suppose que c’est dans leur ligne éditoriale) ayant comme d’habitude la décence de laisser un nombre très réduits de réalisateurs mettre en scène les épisodes, ce qui permet une vraie cohérence. Sans jamais avoir l’air poseur ou vulgaire, le style visuel de Kingdom est absolument superbe, tout en conservant une relative sobriété, une vraie retenue, les screens ici présents ne montrant que des extraits particulièrement marquants. Bref, on rejoint ici Dark ou la première saison de Narcos, dans le genre visuellement impeccable.
Enfin, pas toujours. Je parle depuis tout à l’heure de la série, mais je n’ai eu que peu l’occasion de parler d’hémoglobine. Or Kingdom, c’est une série historique située dans la Corée de l’époque du royaume de Joséon, mais c’est aussi et surtout une série qui parle de monstres mangeurs de chair. Si j’apprécie particulièrement leur design cauchemardesque, j’ai un peu plus de mal avec l’extrême violence dont la série fait parfois preuve (éventrements, décapitations…), d’autant plus que la série use d’effets parfois un peu fatiguants, avec notamment des explosions sanguinolentes qui arrivent directement sur la caméra ou des larves en images de synthèses bien, bien moches. Heureusement, ce genre d’effets, on le retrouve surtout lors des scènes ou les vivants combattent les morts, pas si nombreuses que ça donc, et ces combats restent d’ailleurs impeccablement chorégraphiés.
Mais surtout, quelle horreur que ce dernier épisode! Incroyablement prévisible dans sa première partie et si absurdement mal écrit dans la deuxième qu’il en devient ridicule, il contient probablement un des cliffhangers les plus maladroits que j’ai jamais vu en série, d’autant plus que l’intrigue de la prochaine saison sera visiblement réduite à une grande méchante, alors que la série pouvait présenter bien des scénarios potentiels, vu le contexte historique (interférences chinoises, invasions jurchens…). Entre ça, la gestion des unités de temps catastrophiques, et une réalisation boursouflée, on a au moins une belle vision de tout ce que Kingdom était parvenu à éviter pendant 5 épisodes!